Barres corrigées

L’art est truffé d’erreurs…

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De la discontinuité dans la répétition

comme modèle historiographique

Il est dit que « si vous l’ignorez, l’histoire se répète… ». Pourtant, ne trouvez-vous pas étrange cette foi pour le goût de la nouveauté ? Étonnamment, l’algorithme utilisé par André Cadere va modifier une séquence de départ, jusqu’à ce qu’elle se répète. Dans chaque barre, il inversait systématiquement certains blocs qu’il appelait « erreurs ». Mais puisqu’il avait précisé : « Mon travail ne montre pas de permutations. Mais un rapport — celui entre l’ordre et l’erreur. Celle-ci ne peut exister que par rapport à un ordre… Ce n’est qu’à travers le brusque contact avec la réalité que nous l’apercevons ». Il revendique cette volonté délibérée de commettre « l’erreur », d’opérer un désordre dans l’intelligibilité d’une construction ordonnée.

André Cadere était connu pour considérer l’exposition d’un point de vue minimal : « Le travail est exposé là où il est vu ». Le résultat le plus emblématique est qu’il est intervenu, avec ses barres, dans des lieux, lors d’événements, quand on ne l’y attendait pas. Alors comment ne pas considérer ce comportement comme cette même « erreur ». « Erreur » dans l’ordre d’un système institutionnel qui ne le reconnaît pas. Et puisque ce type de provocation génère inévitablement une certaine publicité, il a finalement été invité à présenter officiellement ses œuvres. Aussi il a développé son mode de présentation, sans changer de devise ; comme le dit H.Bize : « … à partir de 1975 Cadere a ses propres expositions pour lesquelles il développera des process et des procédés très intéressants, tant en termes spatiaux que temporels ». Autrement dit, les institutions acceptaient désormais cette « erreur » sous prétexte de provocation et de nouveauté. Cette interprétation suggère que son système s’est répété, qu’il a pris fin.

Le but de Manu.V, en corrigeant les « erreurs », reproduisant les mêmes interventions, est de voir si et comment les institutions réagissent. Apprendre et comprendre comment l’œuvre d’André Cadere est assimilée, connue et respectée par ceux-là mêmes qui en font l’éloge. Bien sûr, ce faisant, il court le risque d’être considéré comme passéiste, mais l’est-il vraiment ?

Fred.I.R.